2022 a été une année macabre dans le domaine de la santé. Des femmes sont décédées en couches. Des bébés consumés tout entier par les flemmes de la « négligence » à l’hôpital Abdou Aziz Dabakh Sy de Tivaouane. D’autres faits ont aussi marqué le secteur de la santé au Sénégal. Comme la fermeture de l’hôpital Aristide Le Dantec pour réhabilitation et la grève des syndicats de santé pour exiger le respect du protocole d’accord de mai 2022.

L’horreur, sous son habit le plus maléfique, s’est emparée mercredi 25 mai 2022 au service de néonatalogie de l’hôpital Abdou Aziz Sy de Tivaouane, dans l’ouest du Sénégal. 11 nouveau-nés sont morts calcinés.
L’incendie déclaré vers 21 heures (locales et GMT), selon les premiers informations, a été causé par « un court-circuit et le feu s’est propagé très vite », a indiqué le maire de Tivaouane Demba Diop, assurant qu’au moment des faits l’infirmière et la sage-femme étaient sur place.
« L’explosion n’a duré que trois minutes. Cinq minutes après, les sapeurs-pompiers étaient là. Les gens ont utilisé les extincteurs. Mais les produits contenus dans les climatiseurs ont accéléré la propagation », a-t-il dit. « Les deux soignantes présentes dans la salle se sont évanouies, mais ont été réanimées », a souligné l’édile de la ville face à la presse. « Il n’y a pas eu de négligence », s’est-il empressé de dire pour blanchir les autorités.
Toutefois, les déclarations du maire de la ville ont été balayées d’un revers de main par un témoin oculaire. Celui-ci, venu accompagner un patient résidant à Mboro (Commune située à 24 kilomètres de Tivaouane), affirme que la « négligence médicale » a participé à la mort de ces nouveau-nés.

Il soutient qu’au moment de l’incendie, « le vigile n’était même pas sur place. J’ai défoncé la porte et je me suis dirigé directement à la salle pédiatrie ». Pris par la fumée, le témoin, précise qu’il y avait presque dans la salle 15 bébés complétement consumés par le feu. En plus de ça, sur les 7 extincteurs, 2 seulement étaient fonctionnels », raconte t-il. Ce qui fait douter des chiffres avancées par les autorités.
Le Drame était prévisible, l’hôpital manquait de tout
En 2018, le khalife général des Tidianes Serigne Babacar Sy alertait le ministre de la Santé, Abdoulaye Diouf Sarr, sur l’état moribond de l’hôpital Abdou Aziz Sy de Tivaouane. « L’hôpital a besoin d’une assistance. Si l’hôpital était une personne, on dirait qu’il est aujourd’hui paralysé. Il est plus malade que ses patients ».
Le guide religieux, qui n’était visiblement pas rassuré par les promesses des autorités, est allé jusqu’à demander plus de garanties de la part de l’Etat. « L’établissement de santé a besoin non pas de promesses, mais de solutions urgentes », réagissait t-il. « L’hôpital est sale. Il n’y a presque pas assez de médicaments. Je voulais étaler toutes les difficultés de l’hôpital, ici et maintenant, mais on m’en a dissuadé. C’est pourquoi monsieur le ministre ( Abdoulaye Diouf Sarr) je vous remets ce mémorandum dans lequel tous les problèmes sont consignés », confiait le guide religieux plus d’une année avant ce drame.
«Nous avons reçu des promesses dont nous attendons les réalisations. Nous comprenons que cela puisse prendre du temps mais cela tarde trop, il pourrait y avoir des conséquences qui peuvent toucher directement les patients », ajoutait le Khalife général des Tidianes. Une prémonition qui est arrivée avec cet incendie qui a coûté la vie à 11 bébés.
Quelques heures après ce drame, Serigne Cheikh Tidiane Sy Al-Amine a également affirmé sur Asfiahi.org que ce qui s’est passé à l’hôpital de Tivaouane était « prévisible tellement le niveau de délabrement avait dépassé l’entendement. »
Il raconte : « J’y ai amené mon fils malade il y a 3 ans et je me suis rendu compte des difficultés auxquelles le personnel de santé est confronté pour dispenser correctement les soins. Ce personnel ne cessait de lancer des cris de cœur pour appeler les bonnes volontés et l’Etat à leur apporter un soutien. A la place, nous n’avons fait que du saupoudrage depuis plus de 15 ans avec des dons de matériel obsolète et des promesses de construction d’un nouvel hôpital non encore tenues », regrette-t-il.
Au-delà de l’indignation face à ce drame, il assure que « nous sommes tous responsables de n’avoir pas pris les mesures draconiennes pour un nouvel hôpital a Tivaouane. Le régime précédent l’avait érigé en hôpital de niveau 1 alors qu’à la place, nous avons plutôt un centre de santé secondaire. Feu Al Amine et le Khalife général actuel ont toujours tiré la sonnette d’alarme et appelé l’Etat à prendre ses responsabilités. En 2021, le ministre de l’Economie avait annoncé le passage à un hôpital de niveau 2 en partenariat avec le FONSIS. Nous attendons encore le début des travaux. »
Le drame de Tivaouane, provoqué par un court-circuit, selon les premières informations met en lumière les carences du système de santé des hôpitaux du Sénégal et les promesses de modernisation et d’investigations de la part des autorités.
Le président de la République Macky Sall après avoir décrété, un deuil national de trois jours a limogé le ministre de la Santé qui est remplacé par sa directrice, Dr Marie Khémesse Ndiaye.
Et du côté du Parquet, on annonce une auto-saisine et promet que la justice sera impeccable avec toute personne dont la responsabilité serait engagée.
Faut –il espérer une suite judiciaire après les événements similaires qui ont précédé celui de Tivaouane ? Le feuilleton judiciaire après la mort des six (6) nourrissons dans l’incendie du service de néonatalogie de l’hôpital Magatte Lô de Linguére ( ville située à 305 km au nord-est de Dakar) et celle du bébé asphyxié mort calciné à la clinique de Madeleine de Dakar ne donnent pas des raisons d’y croire. Toujours pas de coupables, encore moins de sanction pénale. Le même discours a été tenu par le parquet à chaque fois que pareil drame s’est produit. Mais rien !
Décès en couches de Astou Sokhna à Louga, De Mamy Doura Diallo à Kédougou

L’hôpital Amadou Sakhir Mbaye de Louga a connu un autre drame. Il s’agit de la dame Astou Sokhna. Alors qu’elle devait subir en urgence une césarienne, la dame a souffert de 9 heures 30 à 5 heures 30 du matin avant de rendre l’âme. De telles erreurs médicales, il n’en manque pas dans les établissements de Santé publiques ou privés.
Dramatiquement mis en scène par les médias, ces faits sont souvent rangés sous les projecteurs de la négligence, de l’insolence voir même de mépris des services hospitaliers. Des comportements pas professionnels qui font interroger sur la compétence des blouses blanches. Le pire est que les mis en cause n’ont jamais été sanctionnés à la hauteur de leurs actes pour éviter des cas pareils à l’avenir. Soit ils bénéficient d’une liberté provisoire, soit ils sont placés sous contrôle judiciaire, ou simplement licencié de leur poste.
De l’indifférence totale, l’hôpital Amadou Sakhir Mbaye de Louga est coutumier des faits
L’histoire de Astou Sokhna est un exemple parmi tant d’autres, a fait savoir Moustapha Coly Professeur d’anglais au Lycée Malick Sall de Louga. Selon lui : la maternité de l’hôpital Ahmadou Sakhir Mbaye est un vrai mouroir. Monsieur Coly conseille aux femmes enceintes de ne pas s’y rendre pour les besoins d’accouchement. Parce que « vous y sortirez les pieds devant« .
La mort de cette dame aura alors déclenché le début d’une vaste campagne de dénonciation sur le manque de sérieux et de professionnalisme dans la prise en charge des cas urgents non seulement à la maternité mais aussi dans les autres services de cet hôpital.
Une organisation mafieuse révélée à l’hôpital Amadou Sakhir Mbaye
D’après toujours le témoignage de monsieur Coly, une organisation mafieuse est opérée au sein de cet établissement. « Dans cet hôpital, on constate que tous les diplômés ou presque ont ouvert à leurs domiciles des cliniques privées. Ils consultent leurs patients avant de se rendre à l’hôpital de ce fait ils arrivent souvent en retard à leurs postes. Certains s’absentent prétextant un séminaire. Pour se rendre compte de leurs stratagèmes, c’est leurs secrétaires qui viennent vous souffler à l’oreille, vous informant que le Monsieur consulte à domicile, alors que vous avez déjà payé votre ticket. Ceux qui en ont les moyens vont s’y rendre, les autres sont obligés de prendre une autre date de rendez-vous avec la complicité des secrétaires« , a t-il fait savoir » dans un post sur le réseau social Facebook.
L’époux de la défunte dépose une plainte et l’hôpital apporte sa version es faits
Modou, le mari de Astou Sokhna a informé que » l’hôpital pour étouffer la mort de sa femme a produit, un certificat de décès, sans signature, qui évoque une mort naturelle, rédigé à la hâte« . Il raconte : « En 9 mois, ma femme n’a jamais raté un seul rendez-vous. Dans son dossier, il était mentionné qu’elle allait accoucher par césarienne parce qu’elle avait une complication par le passé. Jeudi, à part une perfusion, il n’y a rien qui a été fait pour elle. C’est vers 14 heures que sa mère est venue. A 23 heures, elle souffrait énormément mais la sage-femme de garde ne faisait que mettre son doigt dans son sexe. Pourquoi faire ça à une femme qui doit accoucher par césarienne? Vers 4 heures du matin, elle a dit qu’elle commençait à étouffer. On a appelé la sage-femme qui est revenue faire la même chose encore avant de repartir. Elle nous a carrément dit que celui qui doit «programmer » Astou viendra vendredi. Quand Astou a commencé à hurler de douleur, elle lui dit : «Si tu n’arrêtes pas, je fais sortir ton mari et ta maman ».
Astou lui a répondu, en se tordant de douleur, qu’elle ne pouvait pas attendre vendredi. Vers 5 heures du matin, elle ne respirait presque plus. Je l’ai soulevé. Vers 5 heures 30, elle semblait dormir. Je suis sorti de la chambre alors pour prier. C’est en ce moment que sa maman m’a bipé au téléphone. Je me suis dit « ça y est, elle est au bloc opératoire« . Quand je suis revenu, sa maman m’a dit qu’elle était décédée. La sage-femme et les aides-soignants n’étaient même pas au courant. On les a informés, ils sont venus constater le décès avant de repartir. Même la sonde qu’avait Astou, c’est moi qui l’ai enlevée « . Ainsi pour que justice soit faite, une plainte a été déposée ce lundi, par le mari de la défunte.
Nos confrères du journal Libération, renseignaient qu’au moment des faits « il y avait exactement une sage-femme et trois aides-soignants mais personne n’a daigné se préoccuper de la situation d’Astou. Pire, les mots ont volé très bas par moments comme le confie la maman de la défunte : « Ma fille souffrait tellement qu’elle a arraché la perfusion. Elle a supplié la sage-femme pour se faire opérer.«
Le 2 septembre 2022, une autre femme enceinte, Mamy Doura Diallo, est morte au centre de santé de Kédougou, dans les mêmes circonstances.
Fermeture de l’hôpital Aristide Le Dantec pour 18 mois

Construit en 1912, l’hôpital Aristide Le Dantec de Dakar a été fermé le 15 août 2022pour réhabilitation. L’opération a suscité une polémique à cause de la réorientation des malades vers d’autres structures de santé. Les travaux, prévus pour 18 mois, doivent permettre de rebâtir un nouvel hôpital sur une superficie de 3 hectares pour un coût de plus de 60 milliards de FCfa. Ainsi 26 services ont été redéployés dans 10 hôpitaux et 11 dans les centres de santé.
La grève dans le secteur de la santé a également paralysé le fonctionnement de plusieurs structures santé au cours de l’année 2022. Les syndicats exigeant l’application du protocole d’accord signé le 10 mai 2022.
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