L’Organisation internationale pour les migrations (OIM) a organisé un atelier du 24 au 29 octobre intitulé « Communication éthique sur la migration dans les médias », en collaboration avec l’Académie mondiale des médias et de la migration (GMMA, en anglais) de l’OIM et le projet « Migrando Miradas », qui promeut l’éthique communication sur la migration dans les médias. Des professionnels de la communication, des journalistes ainsi que des étudiants en sciences de la communication du Sénégal, du Maroc, de la Guinée et de l’Espagne ont pris part à cette rencontre à Las Palmas, Gran Canaries. Cela leur a permis de comprendre la migration irrégulière de A à Z.
La route des îles Canaries n’est pas une nouvelle dans le domaine de la migration. En 2006, déjà, ceux qui cherchaient à rejoindre l’Europe l’empruntaient, bravant l’agitation de l’océan Atlantique. Près de 10 600 migrants ont débarqué aux îles Canaries, en Espagne, entre le 1er janvier et le 28 août 2022, soit une hausse de 16% par rapport à l’année dernière, selon les chiffres du Haut-commissariat aux réfugiés (HCR).
Visite à la Guardia Civil
Elle est en charge de la coordination de toutes les activités liées à la patrouille en mer. La Guardia Civil (Garde civile, en français) dont l’un des principaux objectifs est de s’assurer que les migrants puissent arriver à destination, travaille H24 et 7 jours/7. Elle dispose d’un grand bâtiment au bord de la mer avec des moyens technologiques sophistiqués et un nombre impressionnant en termes de ressources humaines.
Pour rallier l’Espagne, les migrants africains ont plusieurs points de départs. Il y a le Sénégal (Dakar et Saint-Louis), la Mauritanie, par Nouadhibou, le Sahara, El Ayoune et Tarfaya à partir du Maroc. La durée du voyage en mer est de 13 heures à 8 jours en fonction des zones.

Rappelons qu’il existe un accord de rapatriement entre l’Espagne et certains pays africains dont le Sénégal. Ce qui fait que l’Espagne continue de renvoyer des migrants non éligibles à l’asile vers leurs pays d’origine. Conscients de cela, certains migrants qui débarquent sur les côtes espagnoles arrivent sans documents (pas de pièce d’identité ni de passeport) de peur d’être rapatriés dans leur pays d’origine. Mais, une fois arrivée sains et saufs, la Guardia Civil a mis en place toute une stratégie pour procéder à l’identification pouvant aboutir au rapatriement de certains.
D’abord, il s’agira d’étudier la situation de chaque migrant, cas par cas avec le système d’empreinte pour déterminer le pays d’origine des migrants. Selon Jésus Dias, assistant projet de l’OIM Espagne, la Garde civile, après avoir secouru les migrants, les remet à la disposition de la Police, qui, par la suite demande à la justice de s’occuper de l’identification avec l’aide d’un médecin. Pendant ce temps, ils sont gardés durant 72 heures, pas plus, selon la loi en Espagne, dans un centre de détention provisoire.
Après l’identification, les migrants originaires des pays ayant signé une convention de rapatriement avec l’Espagne vont retourner chez eux, mais pas tous. Certains parmi eux peuvent bénéficier de la protection internationale, un droit qui peut leur être accordé ou non. Et d’autres, pour échapper au rapatriement, avancent des raisons en lien avec les actes condamnés par la société sénégalaise (homosexualité), selon des confidences obtenues par PressAfrik auprès de sources officielles.
En ce qui concerne, les mineurs qui arrivent avec leurs parents, ils seront rapatriés avec eux, si leur cas nécessite. Pour ce qui est des mineurs qui arrivent seuls, ils ne sont pas rapatriés. Car, pour M. Dias, « un mineur sans parent, c’est comme un enfant abandonné. On ne le rapatrie pas. Il sera transféré dans un centre des mineurs ». Dans ces centres, on s’occupe des mineurs. Ils apprennent la langue, ils sont nourris, vêtus, et ont la possibilité de parler avec leurs parents. Lorsqu’ils auront atteint 18 ans, ils ont désormais la liberté de quitter le centre.

Etape Cimetière San Lazaro
Ce sont des vendeurs fleurs ça-e-là qui embellissent l’entrée. Nous sommes au plus grand de tous les cimetières et le seul avec un terrain pour son expansion, il a été inauguré en 1960 et avec la croissance de la ville. Il dispose d’espaces destinés exclusivement aux inhumations des membres des communautés juives et islamiques dont des migrants non identifiés. La visité est guidée par Teodoro Bondyale, secrétaire de la Fédération des associations africaines des îles Canaries (FAAC). Cet octogénaire né en Guinée Equatoriale dans une province espagnole, a présenté aux visiteurs la tombe d’une petite princesse malienne décédée en mars après une traversée en mer.
Le centre de la Croix rouge espagnole
C’est l’un des plus grands centres de détention à Las Palmas, Gran Canaries. Les délégations sénégalaises, marocaines, guinéennes et quelques étudiants locaux ont été reçus par les responsables de la structure avec l’aide des organisateurs dont l’OIM Espagne. Premier consigne, pas de prise de photo. A première vue, on a l’impression d’être dans une prison avec les grilles de clôture, la superposition des lits, la salle de restauration et les terrains de football. Et surtout avec les bracelets d’identification autour du poignet des migrants.
Mais la réalité est toute autre dans ce centre composé de 700 migrants de diverses nationalités dont des Sénégalais, Marocains, Guinéens. Ils sont là en attendant la fin de procédure d’obtention de document comme la protection internationale. Ils ont liberté de sortir pour aller se promener jusqu’à 22 heures et de revenir. Mais la règle est qu’un migrant qui fait 2 jours en dehors du centre, ne sera plus accepté. Ils reçoivent des soins et des cours pour apprendre la langue espagnole. Beaucoup de ces migrants sont ne sont là que pour temporairement. Après avoir obtenu leurs documents, ils poursuivent leur chemin pour aller, à Madrid, à Barcelone ou en France
Des choses à déplorer
Cependant, tout n’est pas rose dans le centre de la Croix-Rouge à Las Palmas. Quelques migrants avec qui nous avons échangé dénoncent des mauvaises conditions d’hygiène. « Quand tu arrives ici, on ne te donne que 5 ensemble, pas plus. Parfois, on manque de savons et de pattes d’dentifrices. Avant, on nous donnait une petite somme à la fin de chaque mois, mais ça fait bientôt deux mois qu’on a rien reçu », a regretté un migrant. En même temps, un autre dénonce la qualité de la nourriture.
Sur la route Afrique de l’Ouest-Atlantique vers les îles Canaries espagnoles, 1.532 décès ont été documentés au cours de la période considérée. Selon l’Organisation internationale pour les migrations, c’est déjà « un chiffre supérieur à toute période de deux ans depuis que l’OIM a commencé à documenter les décès en 2014 ».

Salif Sakhanokho, de retour de Las Palmas (Espagne)
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