La déclaration de Pape Alé Niang sur Twitter, appelant à une relance urgente du secteur du bâtiment et des travaux publics (BTP), résonne comme un cri d’alarme dans un contexte économique déjà fragilisé. Les chiffres publiés par l’Agence nationale de la statistique et de la démographie (Ansd) au troisième trimestre 2024 confirment une tendance inquiétante : une chute de 12,5 % du chiffre d’affaires de l’industrie de la construction, amplifiée par des reculs marqués dans le génie civil (-21,1 %) et la construction de bâtiments (-13,6 %). Ces statistiques mettent en lumière la nécessité d’interventions immédiates pour éviter une aggravation de la situation.
Un secteur vital sous pression
Le secteur BTP joue un rôle central dans l’économie de nombreux pays, notamment en Afrique, où il contribue significativement à l’emploi et à la croissance. Au Sénégal, il représente environ 7 % du PIB et emploie des milliers de travailleurs directs et indirects. Toutefois, la baisse de ses performances économiques menace cet équilibre. La contraction du génie civil, par exemple, impacte des projets d’infrastructure majeurs, tels que les routes et les ponts, essentiels pour relier les zones rurales aux centres urbains.
La relance du secteur BTP est devenue une urgence. #Senegal
— Pape Alé Niang (@papealeniang) December 21, 2024
À titre de comparaison, le Maroc et la Côte d’Ivoire, deux pays africains ayant récemment boosté leurs économies grâce au BTP, offrent des leçons précieuses. Au Maroc, le gouvernement a investi 245 milliards de dirhams (environ 22 milliards d’euros) dans des projets de construction et d’infrastructure en 2023, créant plus de 250 000 emplois. Ces investissements ont également attiré des financements étrangers, notamment pour des projets comme le port de Nador West Med et les logements sociaux. De son côté, la Côte d’Ivoire a vu son PIB croître de 7 % en 2023 grâce à un plan d’investissement de 11 milliards d’euros dans le BTP, incluant des projets phares comme l’autoroute Abidjan-San Pedro et le métro d’Abidjan.
Les enjeux pour le Sénégal
Contrairement à ces exemples, le Sénégal peine à maintenir une dynamique similaire. La chute des investissements publics et privés dans le BTP, combinée à une augmentation des coûts des matériaux de construction, aggrave la situation. Le ciment, par exemple, a connu une hausse de prix de 18 % en 2024, rendant les projets plus coûteux et limitant leur viabilité. Cette situation affecte également les PME locales, qui représentent 80 % des acteurs du secteur, mais manquent de financements pour maintenir leurs activités. Pourtant, le potentiel est là. Une réforme du Plan Sénégal Émergent (PSE) serait de bonne augure, il avait identifié le BTP comme un levier stratégique pour atteindre les objectifs de croissance économique. Les projets comme le Train Express Régional (TER) ou l’autoroute Ila Touba ont démontré la capacité du pays à mener à bien des projets d’envergure. Cependant, leur impact reste limité face aux défis actuels. La relance du secteur BTP passe par des réformes stratégiques et des investissements conséquents. Le gouvernement sénégalais pourrait s’inspirer des modèles marocain et ivoirien en adoptant un plan de relance ambitieux. Cela inclurait la réduction des taxes sur les matériaux de construction, l’introduction de subventions pour les PME du secteur et l’accélération des décaissements pour les projets publics. Par ailleurs, une meilleure gestion des partenariats public-privé (PPP) pourrait attirer des investisseurs étrangers tout en allégeant le fardeau financier de l’État. La transparence dans l’attribution des marchés publics et une politique de lutte contre la corruption seraient également cruciales pour renforcer la confiance des investisseurs.