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En 2009, le Sénégal est entré dans l’ère des autoroutes à péage, avec la construction du premier réseau du genre en Afrique de l’Ouest francophone. Cette avancée majeure s’inscrit dans la politique des autorités visant à désengorger Dakar, une ville fortement touchée par des embouteillages qui faisaient perdre des milliards de francs CFA à l’économie nationale. À elle seule, la capitale polarise 80 % des activités économiques du pays, tandis que 25 % de la population y réside. La construction et l’exploitation, confiées à Eiffage, ont donné naissance à un réseau de près de 43 km, générant une manne financière considérable. En ce mois de septembre 2024, SeneNews s’est penchée sur l’état actuel de la répartition des gains. Combien de véhicules empruntent le péage par jour ? Que touche l’Etat du Sénégal de ces gains ? Qu’en est-il pour Eiffage ? L’enquête.

Le partage inéquitable du butin

L’État du Sénégal et ses partenaires n’ont pas lésiné sur les moyens pour la construction de cette infrastructure. Les 380,2 milliards de FCFA mobilisés représentent l’enveloppe globale de l’autoroute à péage. Cependant, cette somme n’a pas été entièrement investie dans la construction de l’infrastructure routière. Environ 40 % des fonds ont été alloués à la libération d’emprises, à la restauration urbaine, au recasement, ainsi qu’aux projets connexes, aux études, à la supervision et au contrôle. L’infrastructure elle-même représente 60 % de l’investissement total. L’État du Sénégal n’a pas contribué directement à ce budget, tout étant financé par les partenaires. Cela justifie le contrat de concession de 30 ans signé avec Eiffage, prolongé de 5 ans, portant l’échéance à 2049. D’ici là, toutes les recettes seront directement récupérées par l’entreprise exploitante pour couvrir les frais liés à l’ouvrage. Depuis 2022, un nouveau facteur est entré en jeu, permettant à l’État du Sénégal de percevoir une part des recettes de l’autoroute. La Société Eiffage de la Concession de l’Autoroute de l’Avenir (SECAA) a été condamnée à payer 3,3 milliards de FCFA à l’Autorité de Régulation des Marchés Publics (ARMP) pour non-paiement de la redevance de régulation. De plus, le contrat de location des terres utilisées par l’autoroute a été révisé. Sous le régime d’Abdoulaye Wade, cette redevance n’était que de 1 000 FCFA, mais elle est désormais fixée à 2 % du chiffre d’affaires de la société, avec un minimum de 800 millions de FCFA à verser chaque année au Trésor public. En outre, depuis 2022, l’État détient 25 % des parts dans l’exploitation de l’autoroute, suite à deux années de renégociations du contrat initial de 2009.

Autoroute à péage : une voie prisée par les Sénégalais

Bien que la concession ait été prolongée de cinq ans, le Sénégal commence enfin à percevoir une partie des revenus de son autoroute à péage, très fréquentée et dépassant toutes les prévisions initiales. Le trafic sur l’autoroute a connu une hausse exponentielle, avec environ 90 000 véhicules l’empruntant quotidiennement, contre les 30 000 à 50 000 transactions prévues au départ. Le chiffre d’affaires annuel de l’Autoroute de l’Avenir a largement dépassé les 4 milliards de FCFA, et cette tendance devrait se renforcer avec l’augmentation continue du parc automobile sénégalais. Par ailleurs, la banlieue s’étendant toujours plus loin, de plus en plus de personnes préfèrent s’y installer, renforçant l’usage de l’autoroute. Toutefois, un concurrent de taille pourrait freiner cette progression : le Train Express Régional (TER), mis en service il y a moins de cinq ans. L’autoroute à péage, en plus de désengorger Dakar, répond en partie à un objectif social en permettant aux usagers de gagner un temps précieux. Cependant, le coût reste un problème majeur. De nombreux Sénégalais dénoncent le prix élevé des péages, jugé disproportionné par rapport à celui d’autres pays de la sous-région. Entre Malick Sy et Thiaroye, par exemple, l’autoroute inclut un tronçon où le premier péage, à Pikine Technopole, coûte 400 FCFA. Pour parcourir l’intégralité des 42 km de l’autoroute, un automobiliste doit débourser 3 000 FCFA aller-retour, soit 6 000 FCFA au total.