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La polémique ne désenfle pas suite aux propos du Premier ministre Ousmane Sonko. En affirmant, lors de son point de presse de présentation de l’état des lieux de l’économie sénégalaise, que les autorités sortantes falsifiaient les chiffres présentés aux partenaires techniques et financiers tels que le Fonds monétaire international (FMI) et la Banque mondiale, le chef du gouvernement a suscité une kyrielle de réactions. Étonnement et incompréhension sont les sentiments les mieux partagés. Certains se sont interrogés sur le degré d’implication de l’actuel ministre des Finances et du Budget, Cheikh Diba, qui a été directeur de la programmation budgétaire sous son prédécesseur, accusé par Ousmane Sonko, et auparavant conseiller technique du ministre des Finances et du Budget (MFB), chargé du suivi de la mise en œuvre des grands projets du Plan Sénégal Émergent (PSE) et coordonnateur du programme économique et financier conclu avec le FMI. D’autres ont pointé du doigt les fonctionnaires du ministère. Mais, à en croire l’ancien directeur du Bureau organisation et méthode (BOM) sur L’Obs, Pathé Ndiaye, tout cela est gênant, car c’est la crédibilité de notre administration, notamment la technostructure, qui est remise en cause. « Or, les cadres qui occupent les grandes directions de l’administration sont issus de grandes écoles de formation, où leur sont inculquées des valeurs de loyauté et de neutralité dans le travail. Ces valeurs et ces principes leur imposent de ne jamais déformer, manipuler ou modifier les données et informations dont ils disposent dans leur travail. Cela me surprendrait qu’ils fassent entorse à ces principes pour plaire à l’autorité », a-t-il déclaré. Pour ce qui est de la chaîne de responsabilité, Pathé Ndiaye estime qu’à ce stade, il est difficile, voire prématuré, de se prononcer sur la responsabilité de ces hauts fonctionnaires. « Il faudrait attendre le rapport de la Cour des Comptes, seule compétente pour se prononcer et donner les bons chiffres. C’est pourquoi il est regrettable que le Premier ministre ait pris les devants en annonçant des chiffres qui pourraient être remis en cause par le rapport attendu de la Cour des Comptes. À ce moment-là, c’est sa crédibilité qui sera remise en cause et prendra un sacré coup », conclut Pathé Ndiaye. L’ancien patron du BOM approuve donc le silence des hauts fonctionnaires concernés dans cette affaire, du fait du devoir de réserve qui s’impose à eux. « C’est tout à fait normal, et cela n’accrédite pas non plus les propos du Premier ministre Ousmane Sonko. Par contre, c’est le silence des autorités politiques qui ont géré ces départements ministériels qui est incompréhensible. Si ce silence perdure, ce sera accréditer les propos du Premier ministre Ousmane Sonko », prévient-il. De plus, souligne M. Ndiaye, le FMI ne se laisserait pas berner aussi facilement, engageant par la même sa responsabilité. « Il faut savoir que cette organisation, à l’occasion de ses revues trimestrielles ou semestrielles, ne confirme pas dès le premier jour les chiffres donnés par le cabinet du ministère de l’Économie et des Finances. Elle prend généralement le temps d’aller vers les différentes sources d’information pour vérifier avant de conclure. C’est pourquoi ces missions de revue durent entre sept et dix jours. Et c’est pourquoi je serais étonné que le FMI avalise des chiffres manipulés, car sa responsabilité serait engagée », indique-t-il.