M. Cheikh DIBA, Ministre des Finances et du Budget, a procédé ce jeudi 25 septembre 2025, à l’ouverture de la première édition du Forum Structured Finance Africa-SFA, en compagnie de M. Mabouba Diagne, Ministre de l’Agriculture, de l’Équipement rural et de la Souveraineté alimentaire du Sénégal. Les acteurs optent pour un financement structuré pour mobiliser le capital privé.
M. Cheikh Diba, ministre des Finances et du Budget, affirme : «Le choix porté sur le Sénégal pour accueillir cette première édition du Forum sur les financements structurés conforte le rôle stratégique de notre pays dans l’innovation financière, ainsi que son engagement résolu à œuvrer pour une approche collaborative et de co-construction dans la recherche de solutions continentales. Dakar devient, le temps de cette rencontre, un laboratoire d’idées et un espace de partage d’expériences autour de la question centrale du financement de nos économies. Ici, nous affirmons notre conviction que l’Afrique doit trouver en elle-même les voies et moyens pour relever ses défis financiers et économiques ».

Il estime que ce forum crée un cadre unique où se rencontrent et dialoguent l’ensemble des acteurs concernés par le financement du développement.
Selon le ministre Cheikh Diba, Car nous le savons : aucune institution, aucun pays, aucun secteur ne peut, à lui seul, apporter toutes les réponses. Et seule la complémentarité entre États, banques, investisseurs, entreprises privées et partenaires peut permettre d’imaginer et de mettre en œuvre des solutions durables et adaptées aux réalités africaines.
Et le ministre des Finances de rajouter : « Comme vous le savez, nos pays affrontent aujourd’hui des défis budgétaires et financiers considérables. Le constat est unanime : des besoins de financement en forte croissance, alors même que les marges budgétaires se resserrent ; un poids du service de la dette qui limite nos capacités d’investissement ; un accès restreint aux financements concessionnels et des conditions de marché de plus en plus exigeantes ; une vulnérabilité persistante face aux chocs exogènes : hausse des taux, volatilité des prix des matières premières, changement climatique ».
Il martèle que ces contraintes nous obligent à inventer des réponses adaptées, conçues pour répondre à nos réalités africaines et non simplement calquées sur des modèles exogènes.
Financements structurés apparaissent comme un levier incontournable
« Dans ce contexte, les financements structurés apparaissent comme un levier incontournable. Ils ne sont pas seulement des montages financiers sophistiqués. Ils constituent : un outil de partenariat entre acteurs publics et privés, au service d’objectifs communs ; un catalyseur d’innovation, en combinant divers instruments de partenariats public-privé, financements de projet, titrisation, obligations durables ; un accélérateur de croissance inclusive, lorsqu’ils financent des projets à fort impact social et environnemental : infrastructures, énergie, agriculture, digital », a souligné le ministre Cheikh Diba.
Le ministre précise qu’à travers ce Forum, l’ambition est claire : passer du constat à l’action.
Il poursuit : « Ensemble, nous devons bâtir un environnement crédible et attractif, favorable à l’innovation et à la souveraineté financière de nos Etats. Nous devons également mettre l’accent sur le financement des PME/TPE, sur la finance durable et sur le commerce intra-africain, car c’est dans ces secteurs que se joue la transformation structurelle de nos économies ».
Le ministre Cheikh Diba souligne que s’agissant du Sénégal, ce forum s’inscrit en parfaite cohérence avec la stratégie de transformation nationale « Sénégal 2050 », notre référentiel de politique publique.
Le ministre conclut : « Ce forum n’est pas seulement un cadre de réflexion. Il est une plateforme de co-construction où l’expérience de chaque pays, institution, devra enrichir l’action collective. L’Afrique a le potentiel, les talents et l’énergie nécessaires. Structurons-les ensemble pour ouvrir la voie à des solutions adaptées, inclusives et pérennes ».

Un déficit annuel d’infrastructures de l’Afrique estimé entre 130 et 170 milliards de dollars
M. Isaac MBAYE, Directeur général d’Invictus Capital & Finance, a souligné : «C’est un grand honneur et une immense joie de vous souhaiter la bienvenue à Dakar, à l’occasion de cette première édition du Forum Structured Finance Africa-SFA .L’Afrique fait face à une équation complexe :Un déficit annuel d’infrastructures estimé entre 130 et 170 milliards de dollars ; Près de 2 800 milliards de dollars nécessaires d’ici 2030 pour l’adaptation au changement climatique ; Et environ 4 000 milliards de dollars par an pour atteindre les Objectifs de Développement Durable selon la Banque Africaine de Développement ».
M. Mbaye estime que ces chiffres traduisent une réalité : « nos besoins de financement sont colossaux, mais les flux disponibles demeurent insuffisants et souvent contraints par les niveaux d’endettement de nos pays ».
« Face à ce constat, nous avons une responsabilité : inventer de nouvelles approches. C’est ici qu’intervient le financement structuré. Parce qu’il permet de mutualiser les risques, d’allonger les maturités, de mobiliser le capital privé et de créer des instruments sur mesure, il constitue une voie crédible et incontournable pour bâtir une architecture financière africaine plus robuste », précise-t-il.
Et M. Mbaye de renchérir : « Distingués invités, le SFA Forum n’est pas une simple conférence. C’est un atelier de solutions. Les panels de ce jour aborderont des sujets clés : comment élargir l’accès aux capitaux à long terme, comment renforcer la confiance des investisseurs, comment intégrer durablement les PME et les fintechs dans les chaînes de financement. Mais surtout, ce Forum est une invitation à bâtir des partenariats concrets. Car aucun acteur qu’il soit public, privé ou multilatéral – ne peut, seul, relever les défis auxquels l’Afrique est confrontée ».
Accentuation des contraintes budgétaires
Quant à M. Badanam Patoki, Président de L’AMF-UMOA, il avance : « C’est avec un réel plaisir que je m’exprime devant vous à l’occasion de la première édition du Forum sur la Finance Structurée en Afrique. Le thème de ce Forum, à savoir « Innovations Financières et Transformation Structurelle des Économies Africaines », sujet tant crucial que fascinant, illustre bien l’urgence et l’ambition de notre mission commune ».
Le Président de L’AMF-UMOA souligne que d’un côté, le constat est sans appel : « un déficit de financement des infrastructures qui dépasse les 100 milliards de dollars par an ; des contraintes budgétaires qui s’accentuent sous le poids de la dette publique ; un tissu de PME, un pilier fort de nos économies, mais qui a un accès limité au financement ; des besoins de financement globaux qui excèdent les 130 milliards de dollars par an ».
Et de l’autre côté, il estime que leur potentiel est immense : « une épargne locale croissante ; une diaspora dynamique, désireuse de participer au développement du continent ; une capacité appréciable de financement des investisseurs institutionnels. A titre d’illustration, l’Africa Finance Corporation (AFC) estime que le Continent dispose de 4 000 milliards de dollars dans des institutions domestiques, telles que les fonds de pension et les fonds souverains ; une jeunesse entreprenante qui invente quotidiennement les business models de demain ; des instruments financiers, comme la titrisation, les produits de la finance islamique et ceux de la finance durable qui font leurs preuves ».
Il rajoute : « Pour que l’Afrique parvienne à transformer durablement ses économies, des réformes structurelles sont indispensables. Mais, ces réformes ne pourront aboutir sans une refonte profonde de notre secteur financier. L’innovation financière, puisque c’est de cela qu’il s’agit, n’est pas simplement une adaptation des systèmes existants, mais une redéfinition de la manière dont le financement est conçu, mis à disposition et utilisé ».
Le Président de L’AMF-UMOA précise que : « Les innovations financières ne sont pas seulement des concepts techniques. Elles peuvent avoir un impact profond sur nos sociétés. En favorisant l’accès aux services financiers de base, elles contribuent directement à la réduction de la pauvreté et des inégalités, en donnant aux populations vulnérables les moyens d’investir dans l’éducation, la santé et l’entrepreneuriat. De même, en facilitant le financement des start-ups et des PME grâce à la digitalisation, elles stimulent l’essor d’industries locales et accélèrent la diversification de nos économies dans des secteurs clés tels que l’agriculture, la technologie, l’énergie et la santé ».
« En cela, permettez-moi de partager avec vous quelques perspectives qui guident notre action : Premièrement, la titrisation. A notre sens, elle doit passer d’un instrument marginal à un pilier de notre architecture financière. Le cadre adopté dès 2010 a permis des avancées, mais le potentiel reste largement sous-exploité. Notre priorité est d’élargir les actifs éligibles, d’améliorer la liquidité et la transparence, et de simplifier l’exécution des opérations grâce à un guide pratique destiné aux émetteurs ; Deuxièmement, la finance durable. Malgré des avancées notables, dont la mobilisation de 275 milliards de FCFA par le secteur privé, les émissions restent marginales, en particulier du côté des États. C’est pourquoi, après la publication d’un guide sur l’émission des obligations vertes, sociales et durables, et de la taxonomie des projets, nous avons adopté une stratégie de promotion du marché des capitaux durables et institué un colloque biennal dont la première édition a eu lieu en septembre 2023 à Abidjan, en Côte d’Ivoire, et la prochaine prévue ici même à Dakar, les 30 et 31 octobre 2025 ; Troisièmement, la finance islamique. Avant même l’adoption, en 2022, d’un cadre réglementaire dédié, elle avait déjà permis de mobiliser plus de 1 400 milliards de FCFA, soit 7,5% des fonds levés depuis 1998. Aujourd’hui, grâce à ce nouveau cadre couvrant Sukuk, sociétés d’émission et fonds dédiés, les conditions sont réunies pour bâtir un véritable marché de capitaux islamiques au service du financement de nos économies ; Quatrièmement, la digitalisation et les fintechs. Elles transforment profondément l’accès au financement et l’efficacité du marché. A cet effet, l’AMF-UMOA a rendu obligatoire, pour les courtiers, le dispositif de la Bourse en ligne, innovation technologique majeure visant à renforcer la liquidité du marché, attirer de nouveaux investisseurs et favoriser la mobilisation de l’épargne domestique. De même, une étude a été lancée pour analyser les enjeux et perspectives des fintechs et proposer la mise en place d’un dispositif de veille et d’un modèle de régulation adapté, aligné sur les meilleures pratiques internationales ».
Il conclut : « Toutefois, ces perspectives s’accompagnent de défis majeurs un faible niveau d’éducation financière qui limite encore l’adoption de nouveaux outils ;un cadre réglementaire, parfois insuffisant ou incohérent, qui freine l’innovation et expose les utilisateurs à des risques ; des disparités en matière de connectivité numérique qui excluent une partie de la population des bénéfices de la digitalisation ».