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Le Premier ministre a déclenché une polémique en révélant au grand public des manipulations de données économiques, la dissimulation d’une dette colossale et l’utilisation abusive de fonds publics, soulignant l’ampleur des irrégularités sous l’ancien régime pour séduire le FMI et la Banque mondiale. En réalité, d’après Ousmane Sonko, l’audit qu’il a commandité a révélé que la dette publique avait atteint un niveau alarmant de 83,7 % du PIB en 2023, bien au-delà des 73,6 % précédemment annoncés par l’administration sortante. Une telle manipulation des chiffres trompe non seulement les citoyens, mais compromet également la confiance des partenaires internationaux, tels que le Fonds monétaire international (FMI) et la Banque mondiale, qui fondent leurs financements sur des données fiables et transparentes. Dès lors, l’on s’interroge : est-il possible de manipuler les chiffres économiques du Sénégal auprès des instances internationales ? Réponses. Après près de six mois au pouvoir, le nouveau régime, par la voix du chef du gouvernement, a dressé un état des lieux de la gouvernance de Macky Sall, de 2012 à 2024. Se basant sur le rapport établi à partir des audits effectués, Ousmane Sonko a annoncé, lors d’un point de presse, la situation de référence des finances publiques. « Le régime du Président Macky Sall a menti au peuple et aux partenaires en falsifiant les chiffres pour donner une image économique qui n’a rien à voir avec la réalité », a-t-il déclaré. Ces actes, s’ils sont avérés, montrent que le précédent régime a non seulement compromis la souveraineté budgétaire, mais également plongé le Sénégal dans une spirale de dettes, nuisant à sa stabilité économique. De plus, cela soulève des questions sur la fiabilité des chiffres de l’inflation fournis par des institutions financières, car ils pourraient avoir été basés sur des données falsifiées.

« Une complicité des instances financières »

Concernant l’authenticité des chiffres économiques du Sénégal auprès des institutions financières comme la Banque mondiale ou le FMI, l’économiste Meissa Babou répond affirmativement. Il prend pour exemple l’affaire de la Grèce et du Congo-Brazzaville. « Quand on a découvert le pot aux roses pour la Grèce, ils sont allés jusqu’à ne plus payer les salaires des retraités. Ce n’était plus possible parce que le redressement économique était extraordinairement difficile. Ce sont des pratiques mafieuses que l’on connaît, mais je soupçonne la complicité du FMI dans certains cas. L’institution financière sait pertinemment que ni la dette du Sénégal ni le déficit budgétaire n’étaient à ce niveau. Encore pire, 80 % d’endettement alors que la norme est de 70 %. Je crois que dans le cadre du contrôle du FMI, pour aider un pays à sortir de certaines difficultés, il faut l’arrêter à 70 %. Le FMI a vu tout cela, a laissé faire et a participé à la mascarade. » Cependant, les précisions apportées par le nouveau Représentant résident du FMI au Sénégal invite à la prudence. D’après Majdi Debbich, « le rapport d’audit général sur les finances publiques, auquel Ousmane Sonko s’est référé pour justifier ses propos alarmistes, est encore en phase de certification au niveau de la Cour des comptes ». Cette précision est cruciale, car elle démontre que les conclusions définitives de cet audit ne sont pas encore disponibles. Il apparaît donc que les affirmations du chef du gouvernement ont été sorties de leur contexte puisqu’elles sont basées sur des informations non validées par les autorités compétentes. Selon l’économiste Mor Gassama, « dans les principes, la manipulation des chiffres avec les institutions financières ne devrait pas être possible et personne ne devrait même oser le faire. » Tout de même, le FMI a salué cet élan de transparence. Dans un tweet, Julie Kozack, porte-parole du FMI, a exprimé le soutien de l’institution à l’audit général des finances publiques mené par le gouvernement sénégalais, tout en louant l’engagement des nouvelles autorités à améliorer la gouvernance et la transparence budgétaire. « Les autorités ont partagé les résultats de l’audit avec notre équipe. Nous travaillerons étroitement avec elles dans les prochaines semaines pour évaluer l’impact macroéconomique et définir les prochaines étapes », a déclaré Mme Kozack, le samedi 5 octobre 2024.

La vérification des informations

Le problème de la vérification des chiffres pose également question. Si le régime du président Bassirou Diomaye Faye n’était pas intervenu, il n’y aurait personne pour vérifier, étant donné que ce sont les autorités qui fournissent les chiffres officiels présentés au FMI. Le FMI peut ne pas tout remarquer, mais il aurait dû avoir des soupçons. Cependant, dans ces conditions, « qui, au ministère des Finances ou à la direction de la statistique financière, pourrait leur dire que ce qu’ils font est faux ? En tant qu’experts, nous avons toujours dénoncé ces faux chiffres. Vous savez, dans les structures des pays africains, personne ne peut contester si le président décide, sinon c’est le limogeage. Et les gens se taisent. Le seul responsable, c’est le chef », soutient Meissa Babou, qui a également soulevé une autre réalité. Selon l’expert en économie, « le nouvel ordre mondial vise à enfoncer l’Afrique dans son sous-développement pour l’exploiter. N’oublions pas que ce sont les Européens et les Américains qui détiennent la majorité du capital du FMI et de la Banque mondiale. Ces puissances déroulent leur agenda, qui inclut l’exploitation de nos ressources minières, le refus de nous donner une autonomie alimentaire, et l’engagement dans des projets non-sociaux. Tout cela est en contradiction avec le vécu quotidien extrêmement difficile des Sénégalais et des Africains en général. À chaque fois qu’un projet majeur non structurant est attribué à une entreprise française, turque ou américaine, le FMI le valide. Parce qu’il veut nous enfoncer dans un endettement menant à un ajustement économique ou financier. » Les déclarations du chef du gouvernement Bassirou Diomaye Faye, selon lesquelles le précédent gouvernement a « menti » au peuple en sous-estimant la dette et le déficit public, se réfèrent au rapport d’audit financier de la dette publique d’août 2022 de la Cour des comptes. Cette dernière avait validé les encours de la dette pour les années 2019 et 2020, qui s’élevaient respectivement à 7 825 et 8 903 milliards CFA, soit 56,64 % et 63,56 % du PIB. Pour ces deux années, doit-on en déduire que le gouvernement actuel est en désaccord avec la Cour des comptes ?