Depuis l’avènement de la 3e alternance au Sénégal, les populations tergiversent sur le modèle économique sur lequel le Sénégal tangue actuellement. Ce quiproquo résulte du fait que pendant presque 12 ans, le régime de Macky Sall avait mis le pays sur les rampes d’un modèle économique dont le fil conducteur est le Plan Sénégal Émergent (PSE). Une orientation en déphasage avec la vision des souverainistes nouvellement au pouvoir. Bassirou Diomaye Faye et ses hommes avaient promis aux Sénégalais un modèle économique introverti basé sur un projet novateur. Le PSE continue-t-il ou bien notre modèle économique a-t-il dans la plus grande douceur basculé vers le nouveau projet ? La question trouve toute son essence dans l’attente des populations soucieuses d’un changement dans le bon sens de leur condition d’existence et dans les brefs délais.
Le PSE, un obstacle pour le nouveau régime
Les meilleures conditions de vie commencent par la réduction drastique du coût de la vie, mais malgré une volonté réelle de Bassirou Diomaye et de son gouvernement, le modèle économique hérité de l’ancien régime constitue un facteur bloquant. El Hadji Amadou Samb, membre actif de la société civile et expert en orientation budgétaire, lors de son passage à SENENEWS, confirme cette thèse. « Le budget 2024 est antérieur à l’élection de Bassirou Diomaye Faye, or on sait que ce budget voté à l’Assemblée nationale s’adosse sur le Plan Sénégal Émergent qui n’est pas la vision des nouvelles autorités. Le budget est une loi qu’on ne peut changer que par une procédure. Pour changer de paradigme et s’appuyer sur leur propre vision, les nouvelles autorités devront retourner à l’Assemblée nationale pour faire voter une loi de finances rectificative. Le souci avec cette procédure, c’est qu’elles sont minoritaires à l’hémicycle. Donc en termes clairs, les liges ne pourront pas bouger de manière considérable avant 2025 », fait savoir le spécialiste.
Le projet dans une impasse
C’est un gouvernement qui a hérité de problèmes socio-politiques et d’un taux d’endettement de 76 % du PIB, plaçant le Sénégal dans une zone rouge tel que stipulé par l’Union économique et monétaire des États de l’Afrique de l’Ouest. Ce sont les revers du PSE, un programme qui s’appuie sur trois leviers : la transformation structurelle de l’économie, le capital humain et la promotion des institutions. Les nouvelles autorités avant même de prendre le pouvoir savaient que ces difficultés les attendaient ; elles jouent sur le temps, en attendant que l’année tire à sa fin pour pouvoir mettre en place leur propre politique. Mais pour le moment, économiquement, « le Sénégal déroule le PAP2A (Plan d’Action Prioritaire Ajusté et Accéléré) et le PAP (le Plan d’Accompagnement Personnalisé). Ces deux leviers étant des déclinaisons du PSE », ajoute M. Samb. C’est difficile pour le nouveau régime à l’heure actuelle, mais ils ont la chance d’avoir un ministre des Finances qui était l’ancien directeur de la programmation budgétaire sous Macky Sall. C’est un monsieur qui maîtrise à merveille le PSE et je pense que son choix comme ministre n’est pas une simple coïncidence. Il sert de train de transition entre le PSE et le basculement vers le nouveau projet d’ici un an ou deux ans. Tout compte fait, n’oublions pas que le régime actuel n’a pas encore une assise parlementaire capable de porter les combats économiques à l’Assemblée nationale. Il faudra peut-être, dans quelques mois, penser à dissoudre l’Assemblée nationale, d’organiser de nouvelles élections et surtout les gagner pour avoir une liberté totale de gestion.