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Au Sénégal, la Tabaski donne lieu à une grande effervescence sur le marché ovin au Sénégal. Durant cette période, où la consommation de viande de mouton atteint des pics exceptionnels, on assiste au développement d’une véritable « économie de la Tabaski », à laquelle les autorités étatiques portent une attention particulière. Cette année est assez particulière dans la mesure où le nouveau régime a déjà promis aux populations des prix de mouton abordables. Cependant, si l’on se fie aux professionnels du secteur de l’élevage, cette volonté sera très difficile à réaliser, car il y a une panoplie de préalables que les autorités n’ont toujours pas respectés pour arriver à leur fin.

Une si belle volonté de réduire le prix du mouton

Prévue au milieu du mois de juin (le 17 juin), la Tabaski constitue actuellement au Sénégal la fête phare qui empêche de dormir bon nombre de pères de famille. Si cette fête constitue un gouffre financier pour les divers frais qu’elle engendre, s’acquitter d’un mouton est le sommet difficile à atteindre d’une montagne de dépenses. Lors du conseil interministériel sur les préparatifs de la Tabaski, présidé par le Premier ministre Ousmane Sonko, 14 résolutions ont été prises pour alléger les prix du mouton. De ce schéma, tendant chaque année à dégager des mesures circonstancielles pour le bon déroulement de l’événement, le chef du gouvernement n’en veut plus. Il veut s’appuyer sur une politique de souveraineté durable pour que cette question cesse d’être posée sur la table du gouvernement. « Nous ne sommes pas contre la volonté du chef de l’État de vouloir diminuer le prix du mouton à l’occasion de la Tabaski 2024. Mais nous avons fait savoir les préalables au Premier ministre lors du conseil interministériel », déclare Dieynaba Sidibé, directrice de la fondation des femmes éleveurs du Sénégal. Les professionnels de l’élevage semblent ne pas être emballés par l’idée d’une diminution des prix pour le mouton. « Il faudrait d’abord que des subventions considérables soient appliquées sur le transport et les aliments de bétail, qui coûtent extrêmement cher actuellement. Contrairement à l’année dernière, où il y avait beaucoup d’herbes, la Tabaski de cette année coïncide avec une période difficile où les moutons n’ont plus rien à manger dans la brousse », ajoute Harouna Sow, le président des éleveurs du Sénégal.

Au-delà du prix, un autre défi aussi important

La Tabaski est un moment de déstockage important qui représente une part considérable des ventes annuelles pour la plupart des éleveurs. Néanmoins, les pratiques permettant de répondre qualitativement à la demande spécifique de moutons de Tabaski (sélection d’animaux, embouche plusieurs mois à l’avance) ne sont pas encore majoritairement adoptées. Les béliers commercialisés sont essentiellement de race peul-peul. Pour bon nombre de spécialistes, le défi premier qui s’impose aux nouvelles autorités est celui de l’autosuffisance en mouton. Comme en 2023, les besoins en moutons pour la Tabaski restent maintenus à 810 000 têtes, dont 260 000 pour la région de Dakar. « Avant que l’État ne parle des prix, il faut d’abord régler la question de l’autosuffisance des moutons. Il y a certes une circulaire qui permet de transporter le bétail à l’intérieur comme celui venant des pays limitrophes sans aucune taxe. Cette circulaire entre en vigueur un mois avant la Tabaski, et prend fin un mois après la fête. Ceci n’est qu’un petit premier pas pour que chaque Sénégalais désireux puisse avoir un mouton », ajoute Dieynaba Sidibé. Elle n’a pas tort d’insister sur la disponibilité du mouton pour les pères et mères de famille pour la prochaine Tabaski, car les nouvelles autorités, avec tout l’espoir qu’elles cristallisent, risquent de décevoir. Mais Abdourahmane Wade, un expert du ministère du Commerce, maintient l’espoir pour le bon déroulement de la fête du mouton. « Les services du ministère du Commerce sont très compétents et ont assez d’expérience pour ce genre d’événements. Même si nous sommes maintenant régis par un nouveau régime, ceci n’impactera pas l’organisation de la Tabaski. Que ce soit pour le mouton ou les autres condiments, nous travaillons d’arrache-pied pour soulager les Sénégalais. » À seulement moins d’un mois de la célébration de l’Aid El Fitr, les promesses du nouveau régime pour la disponibilité des moutons en quantité suffisante et à des prix abordables seront confrontées à la dure réalité des éleveurs.