connexion internet senegal - Senenews - Actualité au Sénégal, Politique, Économie, Sport

Il ne se passe plus un trimestre sans que les opérateurs de téléphonie proposent à leurs clientèles de nouvelles offres, des packages qui ne font souvent guère l’affaire de ces dernières. Orange et Free représentent ainsi, depuis quelques temps, le visage du mal des consommateurs qui dépensent beaucoup trop de sous pour jouir de leur droit à la connectivité. A l’heure où la digitalisation devient une priorité pour l’administration sénégalaise et partant ses usagers, les deux opérateurs les plus en vue, au lieu de faciliter l’accès à un internet abondant et de haut débit, se distinguent de par leur boulimie de capitalistes en faisant l’impasse sur le mieux-être numérique des consommateurs. Une situation qui a conduit à la naissance du F4C, un collectif qui dénonce la cherté des coûts de la connexion. De la lecture de plusieurs articles constitutionnels, il peut ressortir que l’accès à l’internet est un droit fondamental pour tout citoyen sénégalais. Le droit à l’information, par exemple, suffit à lui seul pour justifier cet état de fait. Pourtant, bien des opérateurs au Sénégal, chacun proportionnellement à son envergure, se plaisent à violer cette disposition constitutionnelle. Bien évidemment, le non ou difficile accès à l’internet ne peut qu’être interprété comme un obstacle majeur pour l’usager d’exercer ce droit devenu élémentaire.

La connectivité: un droit, mais pas un luxe

L’avènement du covid-19 avait fini par nous montrer que l’internet n’était plus un luxe, mais plutôt un outil nécessaire à la réalisation de ses droits contenus dans les textes nationaux et internationaux. En effet, de la Déclaration universelle des droits de l’Homme (1948) au Pacte international relatif aux droits économiques sociaux et culturels en passant par l’Agenda 2063 de l’Union africaine et le programme « High Five » de la Banque africaine de développement dont l’une des priorité est « connecter l’Afrique », la centralité de la connectivité ne souffre d’aucune interprétation. Dans un monde où l’éducation, la santé, le travail, autant de droits contenus dans ces textes, ne sont plus possibles sans recourir à l’internet, ne pas en disposer devient un manque grave au respect des droits humains. Au Sénégal, le problème devient plus poignant dès lors que les décisions fortes prises par le gouvernement risquent de nous plonger dans une digitalisation à grande échelle des procédures administratives. Face à cet enjeu majeur, il faut convenir que la hausse des coûts de l’internet et la qualité très pauvre des débits proposés doivent prendre une place de choix dans les mesures à prendre. Le « balai » du candidat Diomaye Faye ne doit pas laisser persister cette boulimie qui, vue sous tous les angles, n’est qu’un manque de respect aux citoyens sénégalais.

La connexion est devenue la première des denrées de première nécessité

En vérité, la lutte contre la cherté de la vie ne saurait se limiter dans la réduction des prix des denrées de nécessité, pour laquelle le président Bassirou Diomaye Faye avait donné des injonctions d’ici le 15 mai. La connexion est devenue, même si elle est du cadre numérique, la première denrée dont les citoyens ont besoin pour vivre décemment. Au-delà de l’aspect informationnel et communicationnel, l’internet est un outil de travail (e-commerce, télétravail, e-learning, etc) dont personne ne peut plus se passer. Même plus les ménages à faibles revenus, adeptes du système-D, et qui attendent la dépense quotidienne via les services de transfert d’argent. Pourtant, Free et Orange, qui opèrent dans bon nombre de pays dont la France, ne présentent lus de garantie d’efficience par rapport à la disponibilité de la connexion. Après avoir appâté les clients avec des offres acceptables, les deux opérateurs se ruent dans le sens inversement attendu. Dans le deuxième trimestre de 2022, Orange Sénégal a réduit de moitié les offres sur les Flybox et doublé les prix: de 9000 cfa pour 160 Go, on se retrouve à 80 Go pour le même montant tandis que les 300 Go offerts pour 16 900 cfa ont été ramenés à 160 Go. La lavée de bois vert des consommateurs et usagers n’a pu rien y faire, laissés à eux-mêmes par l’Etat qui ferma les yeux sur le diktat inacceptable des opérateurs. Orange restant même sourde aux injonctions de l’Artp, c’est tout naturel que Free Sénégal lui ait emboité le pas, diminuant progressivement ses forfaits dont celui qui valait 4900 pour 12.5 Go est réduit à 7.5 Go.

Alléger les procédures passe nécessairement par la mise à disponibilité de la connexion à prix réduit

Dans un moment charnière de besoin de digitalisation, la première étape devient l’accessibilité et à un coût social de la connexion. Le lancement du « Front contre la cherté des Coûts de Connexion » (F4C), le 10 mai dernier, est un premier pas pour que l’usager prenne en charge ses propres revendications là où les associations de consommateurs classiques ont gravement échoué leurs missions. Il faut que le président Faye et son ministre de la Communication, dans leur projet de digitalisation des services, remette de l’ordre dans le packaging adopté par les opérateurs. La connexion qui est le premier intrant doit rester accessible à tous, en quantité et en qualité. Naturellement, il n’y a aucun avantage à réduire les déplacements et présences physiques si virtuellement les usagers vont souffrir pour accéder aux services dont ils ont besoin. L’existence de plateformes ne peut remplacer la présence physique dans les services publics s’il s’avère que le citoyen sénégalais débourse à chaque fois que de besoin pour y accéder via la numérique. C’est pourquoi, pour ne pas plomber le processus et décourager les usagers, l’Etat doit courageusement s’attaquer aux prix de la connexion et restaurer l’ordre comme il le fait dans d’autres secteurs. Si l’internet doit être un supplément de dépenses, beaucoup vont préférer faire la navette entre les services d’Etat-civil et chez eux par exemple, pour se faire établir des pièces. Et cela doit relever de l’ordre de la caducité, la connexion étant un droit et non plus un luxe.