Le Sénégal a connu une nouvelle coupure d’internet mobile ce mardi 13 février 2024, une mesure qui coïncide avec l’appel de l’opposition à une autre manifestation silencieuse suite à l’annonce du report de l’élection présidentielle du 25 février. L’interruption de l’accès à internet est perçue comme une tentative de freiner la mobilisation de l’opposition et de limiter la diffusion de messages haineux à l’égard du gouvernement. Les Sénégalais, confrontés à ces restrictions, voient leurs moyens de communication, de travail et d’organisation sévèrement entravés, suscitant des inquiétudes quant au respect des libertés fondamentales mais également et surtout des interrogations quant à une décision dictatoriale du régime de Macky Sall. En effet, la situation politique au Sénégal s’aggrave chaque jour. Après les manifestations et les affrontements entre les forces de sécurité et les manifestants, c’est maintenant au tour de la coupure des données mobiles. Une mesure qui émane du gouvernement et qui vise à contrôler la propagation de l’information et à maintenir la stabilité dans le pays.
La coupure de l’internet renvoie à une image sombre du Sénégal…
Une décision jugée maladroite par les Sénégalais qui affirment que les organisateurs de la marche pacifique y ont renoncé. « Couper les données mobiles coûte énormément à l’État » atteste le journaliste Assane Samb. Cependant, appuie l’analyste politique, « je pense que c’est un manque à gagner. Et, ce serait même quelque chose de mal pour l’image du Sénégal ». À la place de la coupure des données mobiles, Assane Samb prône la recherche de solutions dans le cadre de ce que le président Macky Sall annonce en termes de décrispation. « Parce qu’apparemment il est dans cette logique. Or, on ne peut pas être dans une logique de décrispation, continuer à couper internet et à réprimer les manifestants. Il faut choisir l’un ou l’autre ». Donc, dans une démarche cohérente, après le rétablissement du signal de Walfadjri, il faut maintenant, selon l’argumentaire de l’analyste politique, « aller dans le sens de rétablir les données mobiles et maintenant continuer à discuter avec les forces vives de la nation pour voir quelles sont les meilleures solutions pour sortir de la crise ».
Pieds et poings liés des opérateurs
Sur le plan juridique, Amadou Ndiaye évoque les raisons de la coupure des données mobiles. « L’internet demeure l’outil principal de tous les intervenants, des acteurs politiques, des acteurs de la société civile, des activistes. Quand on coupe la connexion, c’est comme si tu veux travailler mais que tu n’as plus accès aux locaux. L’État a compris aujourd’hui que couper les données mobiles, c’est un élément de taille pour ne pas permettre un rassemblement de grande ampleur », a fait savoir le juriste. Malheureusement, regrette Amadou Ndiaye en ce qui concerne la licence des opérateurs, « Ils reçoivent leur licence de la part de l’État. Donc, ils sont tenus et obligés de respecter les directives du ministère de la Communication, des Télécommunications et du Numérique. Cela fait même partie des clauses du contrat. À partir de ce moment-là, si les opérateurs, que ce soit Sonatel, Expresso ou même Free, refusent, l’État peut retirer leur licence comme dans le cas de Walfadjri ».
Les clients peuvent porter plainte mais…
Dans ce cas de figure, et étant donné que les opérateurs ne peuvent pas poursuivre l’État en justice, les clients restent donc les seuls à contester cette décision. Cependant, souligne le juriste avec une question : « les clients vont-ils porter plainte contre l’État ou contre les opérateurs ? ». Seulement, objecte-t-il, « il faut savoir que l’État est une autorité qui, même si vous portez plainte, cela n’aura pas de sens. Même si les clients ont ce droit car ils estiment que leurs intérêts sont lésés ou que leurs droits ne sont pas respectés. Mais cela n’aboutira à rien s’il y a une procédure judiciaire ».